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Laurine poussa la porte d'entrée, la tête basse et le cœur gros. Elle pénétra dans le vestibule plongé dans une pénombre froide et pesante. Elle posa très vite son blouson sur le porte manteau et se hâta dans le salon où le feu craquant de la cheminée était tellement plus agréable !
Rachel et Markus étaient assis dans les coussins du divan à regarder l'album photos de la famille … si on peut appeler les personnes qui m'entourent une famille ! Songea Laurine tristement. Ils s'amusaient visiblement beaucoup. Elle appuya une épaule contre l'embrasure de la porte et les observa un long moment en silence … Leurs deux sourires étaient si lumineux, si heureux qu'ils réchauffaient son cœur, tellement meurtri par le souvenir de la dispute. Si pour voir leur bonheur, je devais m'engueuler avec Alicia, pensa-t-elle, le regard brouillé de larmes, alors je ne le regrette pas !
Laurine baissa la tête. Elle pensait aussi avec amertume que c'était ce qu'elle essayait de se persuader depuis… Etait-ce seulement la vérité ? Elle ne savait pas et douter ainsi lui faisait mal. Comment le savoir ? Elle poussa un soupir.
Rachel et Markus l'entendirent vraisemblablement car soudain ils levèrent la tête. Quand ils l'aperçurent, leur sourire s'élargit.
Cela lui fit du bien.
« Pourquoi ne disais-tu rien ? Lui demanda Rachel, visiblement très heureuse de la voir. Il y a longtemps que tu es là ?
- Non, je viens d'arriver … »
Laurine posait des yeux implorants sur sa sœur. Le visage de Rachel se figea. Il y avait dans le regard de Laurine plus que cette supplication, quelque chose de douloureux, d'immensément douloureux. Elle n'eut aucune peine à comprendre et lui sourit tendrement :
« Laurine ?
- ça y est ! Murmura Laurine en baissant les paupières. Ça devait arriver … C'est arrivé !
- Quoi donc ? » Interrogea Markus, inquiet de l'expression de son visage.
Laurine le regarda un instant en silence, les yeux brillants :
« Depuis le début de l'année, Markus, cette fille qui ressemble à Alicia comme une jumelle m'en fait voir de toutes les couleurs. J'acceptais les coups sans broncher pour éviter de me disputer avec Alicia, jusqu'à … »
Elle marqua un temps d'arrêt :
« Jusqu'au premier de l'an ! Cette fois, c'était une fois de trop ! J'ai mis les choses au point avec cette fille. Alicia était là et … et nous nous sommes disputées !
- A cause de … ? »
Laurine inclina la tête. Rachel poussa un soupir de désolation :
« Oh ! Laurine !
- Qu'est ce que tu voulais que je fasse ? Jeta sa sœur, agressive. Que je continue à me laisser faire comme ça parce qu'Alicia est stupide comme il n'est pas permis de l'être ? Mais j'ai ma fierté, moi, après tout et j'en ai marre d'Alicia, de cette Théa Strauss, de ce lycée, de tout ! Il fallait que j'éclate. Je n'en pouvais plus, tu comprends ? Alors nous nous sommes disputées, Alicia et moi … ç'aurait pu être une dispute comme à l'ordinaire… mais voilà, Alicia m'a demandé … elle a osé me demander de choisir entre notre amitié et …
- Et ? Interrogea Rachel doucement, voyant qu'elle hésitait.
- Et vous deux ! »
Rachel et Markus échangèrent un regard navré :
« Alors … ? »
Laurine eut un sourire amer, un sourire qui faisait mal parce qu'il laissait deviner l'ampleur de sa douleur. Elle souffla sur la paume de sa main :
« Alors notre amitié … s'est envolé comme ça … »
Des larmes lui noyèrent les yeux. Elle eut un geste de vague résignation :
« Alicia a même changé de place. Elle est assise à côté de Théa maintenant. Théa a gagné sur toute la ligne. C'est elle qui était seule à sa table jusqu'à présent … maintenant c'est moi ! Et Théa s'est tellement bien débrouillée à monter la presque totalité de la classe contre moi que … que c'est tout juste s'ils ne se réjouissent pas tous de ce qui m'arrive … »
Laurine était effondrée. Ses lèvres tremblaient … Mais elle haussa bravement les épaules :
« Je lui ai balancé une tarte soignée ! Ça m'a fait du bien ! C'est comme si j'en mettais une à tous ces abrutis qui s'amusent du malheur des autres et … et à Alicia surtout ! Maintenant il peut lui arriver n'importe quoi, je m'en balance ! Je ne veux plus jamais entendre parler de l'amitié! Belle foutaise que l'amitié si c'est ça le résultat ! »
Elle sourit d'un sourire très pâle et défait, se détourna et monta à sa chambre, au premier, d'un pas las, abattu …
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