Mon roman - Extrait du tome 2 : une autre vérité
Rachel effleura de sa main la jolie tête blonde qui se cachait encore dans les draps :
« Ma petite chérie … »
Laurine tressaillit, tourna vers elle ses yeux bleus noyés de larmes. Rachel sentit son cœur lui manquer … Mais elle lui sourit, rassurante et tendre, tout en continuant à caresser ses boucles dorées.
« Ma puce …
- Tu as vu …
- Oui, dit Rachel doucement, papa était là, avec Nancy. Il a été désolé d’apprendre que tu avais mal réagi. J’ai eu peur, je leur ai demandé de partir. Je n’aime pas te savoir dans de tels états … J’ai pensé que tu souhaiterais peut-être en parler.
- Hum … »
Laurine respira profondément, resta une seconde silencieuse comme si elle réfléchissait à un problème épineux … puis elle observa longuement le joli visage tout plein de tâches de rousseur qui se penchait vers elle dans la pénombre de la chambre :
« Nous allons avoir une sœur ! Murmura-t-elle enfin.
- Oui …
- Elle va s’appeler Audrey !
- Oui …»
Laurine grimaça :
« Je ne suis pas prête à ça !
- Je sais.
- J’ai beaucoup de mal à accepter l’idée !
- Je sais. Moi aussi, mon ange …
- Oh ! Et puis zut, à la fin ! S’impatienta Laurine en fronçant ses épais sourcils blonds avec une sorte de rage douloureuse qui fit mal à Rachel, consciente de son état d’esprit. Qu’il la fasse, sa famille, avec cette femme ! Qu’il l’élève, son enfant ! Et mieux qu’il n’a pu le faire avec nous ! Nous n’avons plus besoin de lui, n’est ce pas, Rachel ? Nous nous sommes passées de lui depuis tellement longtemps !
- Ma petite Laurine …
- Dire que j’ai pu croire un seul instant qu’il était mieux que maman ! Continua Laurine, déversant d’un seul coup toute sa colère et sa rancune dans un flot incontrôlable de mots tous plus durs et sévères les uns que les autres. Mais ils sont pareils ! Ils n’ont jamais aimé qu’eux-mêmes ! Tu as toujours été plus tolérante et plus lucide, Rachel ! Moi, j’ai bêtement cru que papa nous aimait …
- Mais il nous aime, mon ange ! Dit Rachel, inquiète, essayant de tempérer toute cette violence contenue dans les paroles de sa sœur. Il nous aime à sa façon, et elle ne correspond pas à ce que tu espérais de lui … comme maman. »
Laurine détourna les yeux, pâle et crispée.
« Papa et maman t’ont toujours aimée ! Balbutia-t-elle. Tu es pour eux la fille idéale, bonne élève, intelligente, bourrée de talents, sage, ne posant jamais aucun problème, tu t’es occupée en plus de ta petite sœur, débarrassant ainsi maman de ce fardeau … Tu as toujours réussi ce que tu as entrepris : tu as fait un beau mariage, tu es enceinte, si tu le voulais, tu pourrais te lancer dans n’importe quel travail, tu es naturellement douée pour tout … Tendis que moi … »
Elle ferma un instant les paupières, les lèvres tremblantes :
« J’ai tout faux ! Je n’ai jamais collé à leur aspiration, bien au contraire : élève moyenne, voire mauvaise, incapable de tenir en place, toujours punie pour comportements intempestifs ou devoirs non faits … Tu as couvert un nombre incalculable de ces dérapages, de ces convocations chez le directeur, de ces punitions qui me faisaient hurler de rage… Je me fais l’effet d’être le vilain petit canard de ce conte que tu me lisais certains soirs ! Ma pauvre Rachel ! Qu’est ce que j’ai pu t’en faire voir, quand j’y pense ! Mais tu m’as toujours protégée, toujours … »
Elle la contempla longuement, une tristesse infinie dans le regard. Rachel avait les larmes aux yeux. La gorge nouée, elle pressa contre sa joue la main fine et tremblante qu’elle lui abandonnait. C’était dur d’entendre de tels propos mais elle devinait que Laurine ne pouvait pas faire autrement et elle cachait comme elle pouvait le sentiment douloureux qui lui serrait le cœur.
« Tu as peut-être raison ! Je me suis faite une idée complètement fausse de lui … et je sais maintenant que j’ai fait pareil avec maman ! Ils se valent, tous les deux. J’ai été jalouse, jalouse de le voir s’intéresser à une autre, jalouse de cet enfant qu’il va avoir ! Je ne pensais pas qu’il songerait à être le papa de quelqu’un d’autre ! Et c’est une fille en plus ! Magnifique manière de se faire détrôner comme petite dernière dans le cœur de son père ! Il m’a dit qu’il s’était trompé avec nous ! Je ne l’accepte pas, Rachel, je ne peux pas, tu comprends ?
- Oui, je comprends …
- Il m’a tellement parlé de sa vie future avec cet enfant et cette femme, comme si nous n’existions plus, comme s’il nous avait rayées de sa vie ! Et Nancy fait la même chose ! Ils ne s’intéressent pas à ce que je ressens, surtout papa ! Pas une seule fois, il ne s’est intéressé à ce que je ressentais, mon propre père ! Comment peut-il croire une seconde que je peux entendre ce qu’il dit ? J’ai beau essayé de me protéger… Ils réussissent à me démolir sans même s’en rendre compte et en me faisant culpabiliser en plus ! C’est affreux ! Mais je n’en veux pas de leur histoire ! Je veux qu’ils me fichent la paix !
- Laurine, je t’en prie, calme-toi….
- Je n’ai pas envie de me calmer ! Eclata Laurine, malgré elle emportée par la fureur. J’ai un père qui est sur une autre planète, qui ne se rend compte de rien ! J’ai une mère qui ne m’aime pas, qui a une image de moi absolument désastreuse ! Comment veux-tu que je me calme ? Quelle place j’ai là ? Je découvre mes parents sous des jours que je ne leur connaissais pas, ou que je refusais de voir … Et tu voudrais que je me calme ? Tu préfères peut-être que je me laisse aller au désespoir ?»
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